Un petit extrait choisi, pour la route !-)
Depuis quelque temps, les parlementaires cherchent à criminaliser le délit de très grande vitesse- soit 50 kilomètres-heure au-dessus de la limite. C'est absolument passionnant. D'un côté, le législateur se sent obligé de créer une loi pour punir les infractions les plus graves à une loi qu'il n'a jamais fait respecter. D'un autre côté, des couillus de première exigent le droit de se comporter en tout temps comme au rallye de Monte-Carlo.
L'attitude des Français par rapport au danger ne laisse pas de m'étonner. Deux cents kilomètres-heure, pas de problème. L'autre jour, je fumais sur le balcon, et vers 10 heures du soir je vois un jeune papa sortir d'un appartement avec un enfant de dix ans. Il s'approche de sa moto, lui met un casque, l'assoit sur le siège et démarre. Ce genre de situation est impensable en Amérique, où l'on ne tolère pas le danger physique et où les seuls motards sont soit des ados attardés soit des jeunes retraités en mal de jeunesse. Ici, c'est banal, et le risque est perçu comme un choix individuel. Une autre fois, en prenant ma marche matinale, j'aperçois près de l'école un père arriver en scooter avec ses deux enfants sans casque sur les genoux. En Amérique, les autres parents l'auraient dénoncé à la police.
Ce n'est pas que les Nord-Américains soient plus fifis devant le danger. J'ai plutôt l'impression qu'on ne le perçoit pas de la même façon. Par exemple, en France, le danger extrême c'est d'être exclu, de ne pas obtenir de contrat de travail à durée indéterminée, de ne pas pouvoir profiter de la protection sociale. Ça, c'est le danger. Mais faire du 220 kilomètres-heure, ça n'est pas dangereux : c'est un choix personnel."